Cette année, de nombreux planteurs sont repartis de la foire de Bras-Panon avec un plant d’érianthus, offert sur le stand de la Chambre d’agriculture dans le cadre du plan Ecophyto. Planté autour des parcelles de canne à sucre, l’érianthus (Erianthus arundinaceus) est en effet une arme efficace contre le foreur de tige, dont il limite fortement la reproduction.
C’est le Cirad qui a mis au point à La Réunion cette méthode de lutte agro-écologique contre un ravageur qui fait des dégâts dans de nombreux champs, sans pour autant concerner une région en particulier. Le foreur de tige (Chilo sacchariphagus) peut même provoquer jusqu’à 20 % de perte de tonnage sur une parcelle de canne à sucre dans une exploitation, sans que les parcelles voisines ne soient affectées.
La méthode proposée par le Cirad consiste à utiliser, comme plante piège en bordure de parcelle, l’érianthus qui ressemble fortement à la canne. Cette espèce a la particularité d’attirer les femelles du foreur, qui viennent y pondre, et d’empêcher les larves de terminer leur cycle en les piégeant dans sa tige : les larves meurent dans la plante.
Les premières expérimentations avaient permis de réduire de plus de moitié les pertes de production causées par le foreur de tige. Ce résultat a été confirmé en grandeur réelle chez des exploitants sur des parcelles à problème qui ont été entourées d’une ceinture d’érianthus. Le pourcentage de cannes touchées est tombé de 90 % à 57 % et le taux d’attaque par tige a quasiment été divisé par trois.
Un nombre croissant de planteurs mettent en œuvre cette technique. « Dix années de retour d’expérience ont démontré qu’il n’y avait pas de risque à diffuser cette plante, qui n’est pas envahissante, explique Luc Vanhuffel, ingénieur agronome qui anime, à la Chambre d’agriculture, le réseau de transfert des connaissances liées au plan Ecophyto pour la réduction de l’utilisation des pesticides. De plus, l’érianthus a un bon enracinement et contribue à fixer le sol. Il faut seulement le couper tous les six mois pour éviter qu’il ne devienne trop dur ».
Les recherches ont été poursuivies en vue d’élaborer une stratégie push-pull (repousser-attirer), avec pour référence la lutte contre le foreur de maïs au Kenya. Les essais menés par eRcane et le Cirad ont montré que le pois sabre, Canavalia ensiformis, semé en inter-rang réduisait les dégâts de foreur, avec une efficacité toutefois moindre que celle de l’érianthus. L’intérêt principal des semis de pois sabre en inter-rang reste la maîtrise des adventices, l’effet sur le foreur est un bonus.
« Nous incitons les planteurs confrontés au foreur à installer l’érianthus dans leur exploitation et à le multiplier, poursuit Luc Vanhuffel. Il peut être planté en bordure de parcelle mais aussi par poches, dans des endroits non cultivés. Nous invitons toutefois les agriculteurs à prendre conseil au préalable auprès d’un technicien ».