Les mêmes espèces de mauvaises herbes apparaissent-elles quelle que soit la date de la plantation de la canne ? Quel est le délai moyen de floraison puis de fructification d’une espèce selon la saison ?… C’est à ces questions, et à bien d’autres, que l’étude de Pascal Marnotte, débutée il y a un an, commence à apporter de premières réponses. Des éléments en ont été présentés au dernier comité régional de pilotage du RITA Canne, le 22 juin.
L’étude « Mauvaises herbes : levée et phénologie » comble un manque. Pour répondre à une demande pressante, la malherbologie réunionnaise s’est d’abord focalisée sur l’étude des produits disponibles les plus efficaces et les méthodes culturales de lutte contre l’enherbement.
Mais si les espèces sont bien inventoriées (http://portal.wikwio.org), les conditions dans lesquelles elles apparaissent et prospèrent, sont encore assez mal connues. Pourtant, une meilleure connaissance de ces plantes aiderait à mieux lutter contre elles. A l’aide d’indicateurs, l’objet de l’étude est d’établir les traits de vie d’espèces de mauvaises herbes, c’est-à-dire de décrire leur biologie, ou comment elles se développent, de leur germination à leur floraison, voire leur disparition.
La température, facteur de germination
Douze espèces ont été étudiées sur les sites d’expérimentation d’eRcane de l’Etang-Salé et du Cirad de Bassin Plat. Partant d’un sol nu, l’apparition et le développement des espèces sont observés à différentes périodes de l’année. « Pour mieux lutter contre les mauvaises herbes, il faut en effet bien les connaître et prendre en compte la variabilité de leur comportement dans l’espace et le temps, chaque individu ayant ses particularités. Quelles sont celles qui lèvent selon la période de l’année, l’altitude, quand et comment se développent-elles ? Le but de ce travail est de tirer des enseignements aussi précis que possible pour améliorer les pratiques de lutte » nous a confié Pascal Marnotte.
Ainsi des facteurs agissant sur la germination, bien connus en métropole, le sont moins à La Réunion. En métropole, selon la température, on sait quelles plantes poussent d’une saison à l’autre ; en milieu tropical, malgré une variabilité saisonnière moins marquée, les connaissances restent insuffisantes, du fait probablement d’un régime pluviométrique plus erratique et complexe.
Aucun doute qu’à La Réunion, la température joue aussi un rôle déterminant par rapport à la pluie mais « nous sommes ici sous la coupe de la température et de l’humidité, explique Pascal Marnotte, et il nous faut parvenir à savoir comment ces deux facteurs agissent sur les espèces. Si la date de leur apparition peut être prévue, c’est une information clé pour agir ».
Appauvrir le stock de semences
Connaître le temps que mettra la plante pour parvenir à la floraison et à la fructification est une seconde donnée stratégique. Cette observation renseigne sur la vitesse de recouvrement du terrain. Grâce à ces éléments d’information, il sera possible de gagner les mauvaises herbes de vitesse pour les empêcher de faire leurs graines. « Le meilleur moyen de limiter l’apparition des mauvaises herbes, c’est d’appauvrir le stock de semences dans le sol » explique Pascal Marnotte. En méthode non chimique également, une telle information sera utile pour raisonner la date d’implantation d’une plante de service afin qu’elle occupe le terrain avant la mauvaise herbe.
Cette étude, prévue sur plusieurs années, est complémentaire des connaissances déjà acquises et des travaux qui se poursuivent en matière de maîtrise de l’enherbement, tant par voie chimique que par des méthodes alternatives. Elle les complètera en perfectionnant les pratiques de lutte selon les espèces.
Pour résumer :
• en prélevée, le planteur pourra prédire quelles espèces vont se développer et ainsi ajuster ses pratiques, du choix de sa date de plantation aux méthodes de lutte à retenir pour être le plus efficace ;
• en postlevée, il saura de combien de temps il dispose pour prévenir l’ensemencement et empêcher le recouvrement de sa parcelle.